1960 Jeune garçon heureux dans l’élégant collège – Williams K

Il est certains livres plus difficiles à chroniquer que d’autres. 1960 Jeune garçon heureux dans l’élégant collège est un de ceux là. Écrit par Williams K, ce roman est un ebook gratuit diffusé sous licence libre et notamment disponible sur le site des éditions 999. Et je dois admettre que, si la couverture du roman reste peu attrayante, elle cache un texte surprenant et déstabilisant, mais qui mérite d’être lu, ne serait-ce que par pure curiosité…

Une fois n’est pas coutume, j’ai décidé de scinder ma chronique en deux : une première partie consacrée simplement au synopsis du roman, et une seconde dédiée à mes impressions sur ce livre. Ce découpage s’explique principalement car il me paraît impossible de parler de 1960 Jeune garçon heureux dans l’élégant collège sans en révéler l’intégralité de l’intrigue. Voilà pourquoi j’invite les lecteurs curieux à finir le roman avant d’entamer la seconde partie de ma chronique, qui contiendra quelques « spoilers » (si je puis dire).

1960 jeune garçon dans l'élégant collège

Synopsis de Jeune Garçon

Pour commencer, épargnons-nous un temps précieux en contractant le généreux titre 1960 Jeune garçon heureux dans l’élégant collège en Jeune garçon. Dans Jeune Garçon, donc, le lecteur est confronté à Williams Kern, un ancien orphelin d’origine allemande, devenu un soixantenaire riche au possible, à tel point qu’il passe son temps dans ses songes, à rêver de son enfance… ou tout du moins à la fantasmer.

Le roman a ceci d’étrange qu’il n’est pas consacré à la vie de Williams Kern (son personnage principal) mais plutôt à la vie dont il aurait rêvé. Le personnage s’invente ainsi un homologue adolescent, Will Harts, un collégien anglo-saxon tout juste admis au collège de Wallesmouth, un établissement élitiste et sévère, qui pratique la punition corporelle. Le lecteur est donc balancé entre la vie imaginaire de Will Harts et les pensées de Williams Kern.

Ce synopsis, s’il ne vous a pas déjà perdu, montre déjà une partie de ce qu’est Jeune Garçon à mes yeux : une expérimentation. Car peut-être sans même que l’auteur le réalise, ce dernier livre ici une véritable expérience de narration. En effet, nous sommes dans un ouvrage où le narrateur est clairement identifié comme Williams Kern (le riche oisif). Dès lors, le lecteur a parfaitement conscience que tout l’univers de Will Harts (le jeune collégien) est un mensonge. Plus déroutant encore, la grande majorité du livre comporte des passages de narration. Les dialogues se comptent en effet sur les doigts d’une main, à telle point qu’on a vite l’impression d’être perdu dans le fil des pensées de Williams Kern.

Cette omniprésence du narrateur vient d’ailleurs complètement modifier le sens du récit. Alors qu’à première vue, le collège de Wallesmouth est un lieu respectable mais strict, où les fessées et punitions corporelles sont courantes pour le jeune Will Harts, le collège devient très vite le théâtre des fantasmes de Williams Kern. Car comment considérer autrement ces nombreuses punitions corporelles que comme des fétichismes, quand on sait qu’elles sont issues non pas de la vie d’un collégien mais de l’esprit d’un soixantenaire ?

Si je ne vous ai pas déjà perdu en vous présentant Jeune garçon, je pense qu’il est plus que temps que vous découvriez ce livre par vous-même. Pour être honnête, je pense qu’il y a des chances que le récit de ce roman vous perde. En effet, comme toute expérimentation littéraire, Jeune garçon déroute et pourra vous laisser partager. Le texte va en effet bien plus s’attarder sur le narrateur (dont le nom ressemble d’ailleurs étrangement au pseudonyme de l’auteur…) que sur l’intrigue ou les personnages, d’où un côté parfois répétitif ou long.

Mais plusieurs arguments font que vous devez essayer cette lecture. Pour commencer, il s’agit d’un roman gratuit, donc l’expérience ne vous coûtera rien. Ensuite, récit passionnant ou non, il faut noter que Jeune garçon est remarquablement bien écrit. Pas de lourdeurs, une plume maîtrisée : le style de l’auteur ne vous fera pas fuir. Enfin, ce texte devrait passionner, quoi qu’il arrive, tous les amateurs de littérature qui aiment disséquer ou analyser un ouvrage. Je le recommande également à tous les aspirants auteurs, qui y découvriront une réflexion (peut-être inconsciente de la part de Williams K) sur la narration et les rapports entre narrateur et lecteur.

Bref, je vous invite à découvrir le site de l’auteur, à y télécharger Jeune Garçon et à le lire avant d’entamer la fin de cette chronique, sans quoi je risque de vous en dévoiler certains éléments clefs de l’intrigue (en d’autres termes : SPOILER ALERT !).

Jeune garçon heureux dans l'élégant collège

Vous pouvez cliquer sur la bannière pour télécharger l’ebook en format ePub, Kindle ou PDF

Mes impressions sur Jeune garçon (spoilers)

Pour donner un avis plus complet sur ce roman atypique, je me devais d’en dévoiler davantage l’intrigue. Je parlais plus tôt de vous en révéler l’intrigue, mais je dois avouer que je ne suis pas certain que connaître l’intrigue gâche l’expérience de lecture… pour la simple et bonne raison que Jeune garçon n’est pas vraiment un roman à intrigue, car son récit reste très limité (sans vouloir paraître péjoratif) et exploite très peu de personnages, sinon la présence omniprésente de Williams Kern. Il n’est donc pas question ici de retournement de situation ou de surprise inattendue… quoi que…

Une grande partie du roman se concentre sur l’enfance de Will Harts, et développe notamment deux thématiques : l’éducation parentale et la punition corporelle. Je le disais plus tôt, ces thématiques sont avant tout vues par Williams, le soixantenaire orphelin, même si le récit indique que c’est Will qui vit tous ces moments que l’on sait imaginaires. Et je dois avouer que la présence de ce narrateur étrange, célibataire et visiblement fétichiste, a de quoi déranger. Entendons nous : Jeune garçon n’a rien d’un texte érotique, mais l’existence même de ce narrateur donne parfois des allures d’inceste aux scènes entre Will et sa mère, ou de sulfure aux punitions corporelles répétées que subit le personnage. Et pour cause : Williams Kern indique clairement qu’il est fasciné par les fessées, même si cela reste une perversion « chaste » car elles ne provoquent pas réellement en lui un désir sexuel.

Là où le roman surprend, c’est quand le soixantenaire devient lui-même lassé par ses fantasmes. Ne trouvant plus à l’existence de Will Harts le charme d’autrefois, Kerns se décide à envoyer ses récits à un éditeur, dans le but secret que les modifications sur son manuscrit lui fasse découvrir le monde du collégien sous un autre jour. Or, l’expérience lui offre l’effet contraire. Revisité par un nègre, le roman est devenu éminemment érotique, avec un personnage plus vieux, des scènes de punition corporelles érotisées, des professeurs devenus attirants et sexués… Tout ce que Jeune garçon n’est pas. A tel point que Williams devient écœuré par sa propre œuvre, et refuse de s’associer à ce nouveau texte.

Et là où cette idée de faire envoyer à un éditeur la première partie de Jeune garçon par Williams fait mouche, c’est que les modifications qui dérangent tant le narrateur auraient tout à fait lieu d’être. En effet, je disais que Jeune garçon était une expérimentation, et je le maintiens. Pour cause, si on ne considère pas ce roman comme tel, le texte est un échec complet ! En effet, qui pourrait imaginer écrire tout un roman sur l’obsession d’un homme adulte sur la punition corporelle sans en faire un récit érotique ?

N’étant moi-même pas un grand adepte de la littérature érotique, j’étais en effet dérouté par certains élans du narrateur au début du texte, en comprenant rapidement que le sujet de la punition corporelle ne serait pas uniquement étudié sous le point de vue de l’éducation, mais aussi sous le point de vue sexuel. J’avais alors l’impression de me trouver face à un roman bâtard, qui aurait dû être érotique mais ne l’était pas.

Et pour cause, Jeune garçon est en réalité une véritable réflexion sur la narration, ce qui en fait un texte éminemment littéraire et véritablement intéressant… bien que très troublant et souvent déroutant. En tant que tel, le roman laisse d’ailleurs un grand nombre de questions, à commencer par sa portée autobiographique, tant à travers l’identité de Williams Kern (est-il l’auteur, Williams K ?) qu’à travers cet épisode de l’envoi à un éditeur (Williams K a-t-il véritablement envoyé la première partie de Jeune garçon à un éditeur, ou a-t-il inventé toute cette partie du texte ?).

Au final, je reste partagé entre la conscience d’avoir lu un récit tout bonnement moyen, bien que très bien écrit, et l’excitation (chaste, encore une fois) d’avoir eu entre les mains une véritable réflexion sur le sens de la narration. Mais ne vous y trompez pas, si j’ai accordé autant de lignes à Jeune garçon aujourd’hui, c’est bien car je considère ce texte comme profondément intéressant, bien que j’ai conscience qu’il doit plaire à peu de monde…

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