Si vous vous intéressez à l’actualité de l’auto-édition française, vous avez dû entendre parler du récent succès de Mémé dans les orties, un livre numérique auto-édité par Aurélie Valognes sur Amazon et qui s’est écoulé à plus de 25000 exemplaires. Forte de ce succès, Aurélie n’a pas tardé à signer un contrat avec l’éditeur Michel Lafon.
C’est justement à l’occasion de la sortie de Mémé dans les orties aux éditions Michel Lafon que j’ai eu l’opportunité d’interviewer Aurélie Valognes sur ses récents succès et sur son expérience d’auteur auto-éditée, puis d’auteur éditée !
LSN : Le Souffle Numérique : Bonjour Aurélie, et merci d’avoir accepté de jouer le jeu de l’entretien ici ! Et si vous commenciez par vous présenter aux lecteurs du Souffle Numérique ?
Aurélie Valognes : Bonjour Pierrick. Merci beaucoup de me donner l’opportunité de me faire connaitre sur votre blog. Je suis une nouvelle venue dans le monde des auteurs autoédités et ai la chance de vivre une aventure exceptionnelle avec mon premier roman, Mémé dans les orties.
Passionnée de lecture (surtout de romans de fiction qui donnent la pêche et finissent bien), 32 ans, un mari et un petit garçon, j’avais laissé mon amour pour l’écriture de côté depuis toujours et il s’est imposé à moi il y a un peu plus d’un an, quand j’ai décidé de quitter mon travail et de suivre mon mari pour s’installer en Italie en famille.
Cela n’a pas été facile de passer d’un monde du travail classique avec patron et impératifs d’entreprise à une discipline solitaire dont le résultat n’est attendu par personne. Un vrai challenge qu’il faut mener jusqu’au bout pour pouvoir avoir le plaisir de le partager avec les lecteurs, via l’édition traditionnelle ou via l’autoédition numérique.
LSN : Vous vous êtes fait connaître par les lecteurs en autoéditant votre premier roman, Mémé dans les orties, grâce à Amazon. Pourquoi vous être lancée dans l’autoédition ?
Aurélie Valognes : Jamais je ne m’étais dit en écrivant mon roman que je passerais par l’autoédition, encore moins par Amazon KDP que je ne connaissais pas du tout. Cette aventure du numérique est arrivée par hasard.
Une fois le roman terminé, j’ai demandé l’avis de mon mari et de ma meilleure amie avant de l’envoyer aux maisons d’édition. Tous les deux ont été extrêmement positifs, mais j’ai eu du mal à les croire et ai vraiment eu peur du rejet des maisons d’édition : un premier roman, beaucoup d’appelés, peu d’élus.
Il a été vital pour moi d’avoir l’avis honnête et objectif de vrais lecteurs pour être fixée, pour ne pas être déçue de la réponse négative des éditeurs et ne pas arrêter mon travail d’écriture dès son premier essai. J’ai commencé à chercher sur Internet et suis tombée sur des articles qui présentaient les avantages de l’autoédition. Je voulais pouvoir avoir mon roman en version papier et numérique, Amazon KDP et Kobo étaient les deux que j’ai considérés.
LSN : Comment avez-vous connu la plateforme Kindle d’Amazon ? Êtes-vous vous-même une lectrice numérique ?
Aurélie Valognes : Une fois piquée de curiosité et tentée par l’option de l’autoédition, j’ai fait un premier essai sur la plateforme pour auteurs d’Amazon KDP et en vingt minutes mon document Word s’était transformé en un livre publié, disponible à tous. Très simple pour se lancer, quelques ajustements pour ajouter la version brochée de CreateSpace. Et voilà.
Et je dois avouer que je n’avais jamais lu un livre numérique de ma vie : ma famille et mes amis non plus. Je les ai incités et suis fière d’être le premier livre numérique qu’ils ont lu. Depuis, étant installée à l’étranger et ayant une consommation boulimique de livres, j’ai ajouté la lecture numérique à mes lectures papier.
Deux expériences différentes mais des belles découvertes à chaque fois. Désormais je lis beaucoup de romans autoédités, notamment des jeunes auteurs que j’ai pu rencontrer au salon du livre ou seulement dans les classements des meilleures ventes : Sonia Dagotor, Jacques Vandroux, Enzo Bartoli, Dalila Heuse, Catherine Lang, Claire Buonavista, Florentine Hennon, Marie Navelot, etc…
Jusqu’à présent, je n’ai jamais été déçue et je suis même extrêmement fière puisque dans mon entourage j’ai également trois amies qui se sont mises à l’écriture et ont sauté le pas de l’autoédition (entre autres, Sophie Tal Men, Anne-Gaëlle Huon). C’est vraiment un petit monde avec une entraide incroyable et un très bon esprit.
Aurélie Valognes explique son succès avec Amazon Kindle.
LSN : Votre premier roman met en scène un octogénaire acariâtre, une mamie geek et une fillette. Pourquoi avoir choisi de mettre en scène ce choc des générations ?
Aurélie Valognes : J’aime lire des livres où il se passe de belles rencontres comme on aimerait en voir plus dans la vraie vie. Je voulais mettre l’accent sur une vie de quartier (tous les protagonistes habitent le même immeuble) et faire naitre des amitiés extraordinaires avec des personnes à la vie tout à fait ordinaire (la solidarité n’est pas vraiment ce qui les caractérise au départ).
Quelque part, Ferdinand, le vieil homme acariâtre, représente celui que nous pourrions tous devenir, seul et aigri, si nous ne faisons pas aujourd’hui les efforts pour aimer les gens et suivre ce monde qui change si vite.
En face de chez lui, sur le même palier, Béatrice, 93 ans – encore plus âgée, qui, elle, vit chaque jour comme un cadeau, avec une soif d’apprendre et de rencontrer de nouvelles personnes.
Malheureusement, les deux voisins pourraient continuer à se côtoyer sans jamais vraiment se rencontrer, à moins que l’on introduise la fraicheur d’une enfant, pour qui tout est possible et qui chamboule les règles établies, Juliette, effrontée et pleine d’énergie. Évidemment, ce choc générationnel apporte son lot de situations incongrues et d’humour.
LSN : En mai 2015, Mémé dans les orties est publié par les éditions Michel Lafon. Comment s’est déroulé votre rencontre avec cette maison d’édition ? Qu’en avez-vous retiré ?
Aurélie Valognes : Après avoir hésité à envoyer mon manuscrit aux éditeurs, j’ai finalement sauté le pas quand le roman s’est retrouvé dans le Top 20 d’Amazon et que j’avais obtenu une vingtaine d’avis qui confirmaient l’opinion de mes proches.
J’ai donc proposé mon manuscrit à cinq maisons d’édition. Michel Lafon, mon éditeur actuel, n’en faisait pas partie car il n’a pas de service dédié aux manuscrits. Heureusement, Florian Lafani (de Michel Lafon) m’a envoyé un mail exactement au même moment (toujours utile de laisser son adresse email à la fin de son roman autoédité) pour m’annoncer qu’il était très intéressé par Mémé dans les orties, et les discussions ont commencé avec mon éditeur actuel et d’autres maisons.
L’offre la plus ambitieuse pour faire connaitre le roman a fini par me convaincre, et avec le peu de recul que j’ai aujourd’hui (6 mois de travail en amont du lancement et quinze jours après le lancement), les promesses sont tenues.
J’ai pu retravailler le roman avec l’aide de mon éditeur pour proposer un texte encore plus abouti et d’une qualité dont je suis fière. Et en termes de premiers résultats, même si l’on ne suit pas ses ventes en librairies au jour le jour comme avec l’autoédition, mon éditeur partage avec transparence les progrès de Mémé : aujourd’hui, je viens d’apprendre par mon éditeur que Mémé dans les orties est 38ème des meilleures ventes de livres en France dès sa deuxième semaine de parution (Source Livres Hebdo).
Nous partageons les mêmes rêves pour Mémé et cela fait du bien de ne plus vivre seule l’aventure et de pouvoir saisir les meilleures opportunités grâce à l’expérience apportée par l’éditeur !
LSN : J’ai cru comprendre que vous étiez en train d’écrire un second roman. Envisagez-vous de le publier en auto-édition ou continuerez-vous de travailler avec votre éditeur ?
Aurélie Valognes : Oui effectivement, je suis en train d’écrire mon second roman et je m’amuse beaucoup avec mes personnages complètement loufoques. Je me mets un peu la pression tout seule pour confirmer que ce n’était pas un coup de chance avec Mémé dans les orties. Pas facile…
Pour le moment, toute mon attention est donc sur la qualité de l’histoire, les personnages, le texte. Je ne me pose pas encore la question de comment sera proposé le prochain roman. J’ai la chance de n’avoir aucune contrainte. Je veux pouvoir proposer le meilleur roman possible au plus grand nombre : tout reste ouvert et à décider plus tard en fonction du succès de mon premier roman.
LSN : Votre premier roman s’est écoulé à plus de 25 000 exemplaires sur Amazon ! Quels conseils donneriez-vous à de jeunes auteurs qui chercheraient à se lancer, sur KDP ou ailleurs ?
Aurélie Valognes : J’espérais en vendre un centaine, histoire d’avoir une vingtaine d’avis objectifs mais je n’avais jamais osé penser en vendre autant. 25,000 livres toute seule est une grande fierté mais c’est surtout un chiffre qui reste abstrait pour moi. J’ai du mal à réaliser. Mis bout à bout, cela fait plus grand que la salle de Paris Bercy !!! Cela en jette !
Mais je ne pense pas avoir de recette miracle, du bon sens et un peu de chance. Donc mon premier conseil sera de se lancer, de ne pas avoir peur de l’échec, ne pas se focaliser sur le fait d’entrer tout de suite dans le Top 100. Nous n’avons rien à perdre et déjà écrire un roman est une victoire en soi.
Ensuite, il faut se faire aider sur la relecture, vraiment ! Moi, j’ai relu mon texte plusieurs fois, mon mari aussi, et nous avons laissé passer des dizaines de fautes et coquilles, ce qui est inacceptable quand on a la volonté de présenter un travail de qualité et surtout cela n’est pas pardonné (cf les 13 avis négatifs de mon roman sur Amazon).
Cela est vraiment pénalisant, surtout quand ces commentaires vous suivent sur toute la vie du livre, malgré les corrections apportées dès les premières semaines (et malgré le nouveau texte retravaillé et corrigé par mon éditeur). Et enfin, il faut savoir que, même si la qualité de l’histoire est primordiale, le travail ne s’arrête pas au texte, au contraire.
C’est à partir de ce moment que tout se joue et il faut s’investir personnellement : relancer sa famille et ses amis pour qu’ils lisent et donnent leur avis, travailler avec soin la description du roman, le titre, la couverture pour donner envie. Ce sont les bases à ne pas négliger.
LSN : Vous attendiez-vous à un tel succès en mettant en ligne votre roman pour la première fois ? Qu’est-ce qui a changé dans votre vie depuis la publication de Mémé dans les orties ?
Aurélie Valognes : Je vis une aventure extraordinaire. Tout a commencé par une bonne résolution en janvier 2014, et ensuite, tout s’est enchainé, petit à petit.
Aujourd’hui avec le recul, je prends la mesure de ce qui m’arrive, et cela est incroyable : écrire un roman, passer de l’autoédition à la publication traditionnelle, travailler sur un coin de table dans un café et voir son bébé littéraire en librairie, dans la France entière et plus seulement (traduit en anglais et Coréen, entre autres).
Mais aussi être dans un article pleine-page dans le journal Métro (journal que je lisais chaque matin !), voir mon roman cité sur France Inter et France Culture (que mon père entend en direct live !), être invitée au Salon du Livre et répondre à des interviews pour partager mon expérience : je prends mes quinze minutes sous les spot lights et j’essaie d’en profiter au maximum car cela ne durera pas éternellement.
Et surtout recevoir tant d’emails spontanés de lecteurs enthousiastes m’émeut profondément. Je ne cache pas le fait que j’ai un travail en parallèle, une vie de famille, et le tout est un véritable challenge à gérer au quotidien : mais bien évidemment pour rien au monde je ne reviendrais en arrière !

Vous pourrez en découvrir plus sur Aurélie Valognes grâce à son site internet.
LSN : J’ai l’habitude de terminer chaque entretien en laissant la personne interrogée faire son auto-promo. Que diriez-vous pour inciter les lecteurs à découvrir Mémé dans les orties ?
Aurélie Valognes : Si vous voulez réviser vos classiques en termes d’expressions vieillottes que seules nos (arrières) grands-mères utilisent, si vous avez envie de suivre un Papy Danielle qui, contre toute attente, devient attachant, si vous voulez vous faire surprendre jusqu’à la dernière page, et surtout si vous voulez vous rassurer et lire un roman qui a plu et pourtant n’aura jamais le prix Goncourt… Suivez Mémé jusque dans les orties !
LSN : Merci encore pour avoir répondu à cette interview. Je laisse désormais les lecteurs du Souffle Numérique découvrir Mémé dans les orties sur sa page Amazon !
Félicitations, Aurélie.
Je suis ravie que vous ayez insisté sur l’importance des relectures, car les fautes et coquilles dans les romans auto-publiés apportent de l’eau au moulin de ceux qui mettent en doute la qualité des livres numériques.
Je suis d’accord avec vous aussi sur ce que vous dites à propos des commentaires négatifs postés sur Amazon. Peut-être pourriez-vous leur répondre, sur Amazon, et sur votre site, pour souligner que les corrections ont été effectuées ?
Bonne continuation et bonne chance sur un chemin qui semble très prometteur.
Merci, Pierrick, pour cette interview, très intéressante comme toujours avec vous.
Tipram
je viens de finir le livre et l’ai adoré! D’ailleurs j’y consacre une chronique sur mon blog 🙂
Quelle belle histoire que celui de ce roman, vraiment! Ca donne de l’espoir à tous els jeunes auteurs!
Merci pour ce commentaire ! 😉