Les Top 10 qui ne contiennent que 5 points sont généralement assez décevants… Voilà pourquoi il est plus que temps de terminer notre liste des 10 idées reçues sur les maisons d’édition ! Pour ceux qui l’auraient manqué, nous évoquions la semaine dernière 5 idées reçues, vraies ou non, sur le monde de l’édition. Aujourd’hui, nous terminons cette liste qui pourrait être utile à tous les prétendants auteurs, ou aux simples curieux !
6- Les éditeurs à compte d’auteur sont des escrocs
Nous terminions la première partie de cet article en osant affirmer que les éditeurs n’étaient pas des escrocs… Ou tout du moins pas tous ! Mais il y a un cas particulier qu’il fallait forcément aborder ici, celui des éditeurs à compte d’auteur. Il s’agit des éditeurs qui proposent généreusement à l’auteur qu’il investisse ses propres deniers dans l’édition de son livre. Bien souvent, les écrivains amateurs les apprécient, car ce sont des éditeurs qui glorifient leurs textes et les portent aux nues. Et pour cause, leur chiffre d’affaires dépend du nombre d’auteurs qui leur font confiance. Alors, escrocs ou pas ces éditeurs à compte d’auteur ?
Verdict : VRAI
Bien sûr, voyons ! Si vous doutiez encore de la malhonnêteté de l’édition à compte d’auteur, je ne peux que saluer votre foi en l’espèce humaine. Bref, le concept même d’édition à compte d’auteur est une malhonnêteté intellectuelle. Par édition, on entend la publication et la diffusion d’une œuvre. Or, un éditeur à compte d’auteur se contente généralement d’imprimer un ouvrage (aux frais de l’auteur), puis de le laisser vendre ses bouquins, non pas sans avoir prélevé une généreuse commission. Aucune diffusion n’est faite, et on ne peut même pas vraiment parler d’édition. L’éditeur à compte d’auteur se contentera tout juste d’adapter le manuscrit aux normes de l’imprimeur… et encore !
L’éditeur à compte d’auteur va-t-il chercher à vous enfumer ? (crédits photo)
Pour résumer, ne faites jamais confiance à un tel éditeur. Ce qui va se passer est simple : l’éditeur vous promettra monts et merveilles, empochera votre argent avec plaisir puis vous laissera avec des caisses de votre bouquin à écouler seul… que vous aurez payé deux fois le prix nécessaire ! L’alternative, si vous souhaitez imprimer des exemplaires d’un manuscrit, reste de travailler en auto-édition. Vous pouvez contacter directement un imprimeur local ou trouver un service d’impression à la demande. Le résultat sera le même, mis à part que vous n’aurez pas engraissé un escroc qui se prétend éditeur…
7- Il est inutile de se faire éditer par un petit éditeur
Continuons d’écouter ce que les auteurs pensent parfois à tort. Dans les clichés réguliers, on entend parfois qu’un éditeur local (disons petit éditeur) est totalement inutile. Il faut dire que si on n’est pas édité chez Flammarion, Gallimard ou Laffont, on n’ira pas très loin dans la vie. Alors, vrai ou faux ?
Verdict : FAUX
Il serait totalement idiot de dénigrer ceux qu’on appelle les « petits » éditeurs. D’une car ils participent, bien plus que d’autres, à la richesse de l’édition française, et deux, parce que qui dit petit ne dit pas mauvais. Certes, on trouvera toujours des contre-exemples ou des expériences décevantes, mais les petits éditeurs pratiquent souvent leur métier avec plus de passion et autant d’expérience que les grands.
Faut-il faire confiance à David ou à Goliath ?
Si vous souhaitez donc voir votre ouvrage pris en main par un éditeur, ne vous coupez pas la porte des éditeurs locaux. Par ailleurs, les petits éditeurs peuvent souvent se permettre d’aborder des lignes éditoriales plus pointues ou ambitieuses que les maisons d’édition nationales. Si bien qu’elles seront plus à même d’accepter un livre qui sort un tant soit peu de l’ordinaire. L’essentiel restant, je le disais dans l’article précédent, de cibler correctement les maisons à qui on envoie son manuscrit.
Enfin, n’oubliez pas, chers amis auteurs, que faire éditer un livre chez un petit éditeur ne vous fermera aucune porte. À moins que votre contrat ne le stipule (d’où l’intérêt de le lire attentivement !), vous pourrez continuer à envoyer vos autres textes vers des maisons d’édition plus gargantuesques.
8- Les auteurs de Gallimard vivent de leur plume
Continuons à enfoncer le clou, voire les portes ouvertes, en nous intéressant cette fois-ci aux grands éditeurs. Bien souvent, lorsqu’ils envoient leurs manuscrits à Gallimard, les auteurs rêvent déjà à la célébrité, à l’argent, aux grosses voitures et aux pinups (à moins que je ne confonde avec l’univers du rap ?). Bref, ils idéalisent déjà, rêveurs qu’ils sont, une relation idyllique avec l’éditeur de leur cœur. N’est-ce pas se voiler la face ?
Verdict : FAUX
Je pense qu’il est important de tempérer un peu les ardeurs de tout aspirant écrivain. L’un des problèmes avec l’édition, c’est qu’on est plus tentés de parler des rares success-stories plutôt que des nombreuses failures-stories. Oui, des auteurs comme Marc Lévy gagnent très bien leur vie grâce à leur incomparable talent, mais c’est loin d’être le cas de la majorité des auteurs, grandes maisons d’édition y compris.
Gallimard va-t-il vous apporter argent et succès ?
Alors oui, être édité chez Gallimard vous permettra certainement de briller en société et de toucher un peu d’argent de poche, mais cela ne sera jamais une fin en soi. Nombreux sont les écrivains à ne jamais dépasser le premier roman, et plus nombreux encore ceux qui se contentent de publier un livre de temps à autre, sans jamais avoir les moyens de vivre de leur plume. Bref, voilà une raison de plus de ne pas bouder les petits éditeurs !
9- L’auto-édition est bien mieux que l’édition
Nous avons parlé des grands éditeurs, des petits éditeurs, des éditeurs à compte d’auteur… C’est que nous avons presque fait le tour ! Ah non, il reste un irréductible qui deviendrait presque à la mode ces derniers temps : l’auto-édité. Bon, vous vous doutez que je ne suis pas farouchement opposé à l’auto-édition, puisque j’en fais ! Néanmoins, et une fois de plus, je pense qu’il faut savoir tempérer les propos quand on parle de l’auto-édition. Vous devinez donc déjà le verdict…
Verdict : FAUX
Pourquoi j’ose avancer ici que l’auto-édition n’est pas le monde idyllique que l’on aime à dépeindre ? Tout simplement, parce que ce n’est pas réservé à n’importe qui ! Avec le succès (plus outre-Atlantique que par chez nous) du livre numérique et des plateformes comme Amazon Kindle, on tend de plus souvent à dire que l’auto-édition est l’avenir de l’édition. Une fois encore, des success-stories comme le diablement inspiré 50 Shades of Grey de EL James permettent de confirmer ces propos… si on ne prend pas en compte le fait que EL James a par la suite signé avec des éditeurs.
Or, on oublie de préciser que l’auto-édition exige bien plus de compétences que l’édition à compte d’éditeur. Non content d’écrire son livre, ce qui est déjà bien, l’auteur devra le corriger, le mettre en page, le diffuser, faire sa promotion… j’en passe et des meilleures ! Non seulement cela est particulièrement chronophage, mais c’est également tout aussi compétitif que l’édition classique. Vous ne vous batterez plus contre les milliers d’auteurs qui ont envoyé leur manuscrit à l’éditeur, mais contre les milliers d’auteurs qui auto-éditent leurs ouvrages.
Certes, l’auto-édition peut être une opportunité, d’autant plus que le numérique rend cette activité presque gratuite aujourd’hui, mais ce n’est en rien, non plus, une garantie de succès et de réussite. Je reste d’ailleurs persuadé que certains auteurs ont bien plus à gagner à faire éditer leurs textes qu’à les éditer en indépendant.
10 – « Mon livre est un chef d’œuvre »
Je ne pouvais terminer ce Top 10 des idées reçues sur le monde de l’édition sans faire un peu de provocation. Cette dixième et dernière idée reçue sera donc directement une phrase que disent (ou tout du moins pensent) bon nombre d’aspirants auteurs : « Mon livre est un chef d’œuvre ». Car oui, pondre un bouquin et l’envoyer à un éditeur est un travail de longue haleine, qui tend à créer des liens puissants entre le livre et son auteur. Comme il est presque impossible de trouver son enfant moche, il est toujours tentant de considérer son manuscrit comme un chef d’œuvre. Alors ?
Verdict : FAUX
Bien évidemment, votre livre est loin d’être un chef d’œuvre ! Oh, ne vous sentez pas visé personnellement, cher lecteur, j’attaque ici n’importe quel auteur susceptible de lire ces lignes, déjà édité ou non. Je ne dis pas non plus que votre livre est à jeter, il est sans doute même captivant, mais cela n’en fait pas un grand chef d’œuvre de la littérature. À vrai dire, la littérature elle-même n’est finalement qu’une histoire de recyclage, et cela fait des siècles que les auteurs écrivent les mêmes choses. Finalement, y a-t-il plus grand auteur que Homère, l’un des rares (si tant est qu’il ait existé) à pouvoir se vanter d’être lu des milliers d’années après sa mort ?
On dira ce qu’on veut, Homère a la classe !
Au final, voilà la révélation : si vous vouliez être un grand auteur ou si vous pensiez que votre manuscrit était un chef d’œuvre, vous avez près de trois mille ans de retard. C’est ballot ! Pour autant, faut-il que vous arrêtiez d’écrire ? Faut-il que vous cessiez de vouloir être édité ? Ou de vous auto-éditer ? Pas le moins du monde !
À présent que vous savez que votre manuscrit n’est pas un chef d’œuvre, peut-être le regarderez-vous avec un oeil plus critique. Peut-être que vous oserez enfin le critiquer, le corriger, revenir dessus… Ou, mieux encore, en écrire un autre. Car qui sait, le manuscrit que vous envoyez avec acharnement aux maisons d’édition n’est peut-être pas celui qui est destiné à rencontrer ses lecteurs. Peut-être que votre best-seller se situe encore dans votre tête, et attend seulement que vous repreniez la plume…
Les 10 points sont très utiles et tellement vrais ! Et au final, comme tu dis, il faut qu’un manuscrit soit destiné à rencontrer ses lecteurs pour que l’alchimie fonctionne, on sait tous qu’il n’y a pas de recette magique pour le succès.
Quoi que, maintenant on forge le mythe des auteurs qui débutent en auto-édition et qui soudain rencontrent le succès, comme les 50 nuances de Grey. Je n’y crois pas, je pense que dès le début l’auteur était soutenue par une maison d’édition pour faire décoller l’ouvrage. Parce que ça s’adressait à elle, non, le : « votre livre n’est pas un chef-d’œuvre? » 😉
Pareil pour Henri Potier, la magie d’une maison d’édition c’est de réussir à vendre n’importe quoi juste en faisant de la bonne pub!
Merci pour ton commentaire, Jean-Philippe. Comme tu le dis, un manuscrit doit rencontrer son public, d’où l’intérêt de bien cibler son envoi aux maisons d’édition.
Je ne visais pas particulièrement EL James ou qui que ce soit dans le dixième point. L’idée est surtout de savoir désacraliser son propre manuscrit, car beaucoup d’auteurs sont tellement persuadés de l’intérêt de leur manuscrit qu’ils ne le remettent jamais en doute, ou ne cherchent pas à en écrire un autre. Un écrivain a tout intérêt, une fois ses manuscrits envoyés, à commencer l’écriture d’un nouvel ouvrage sans attendre.
Effectivement, écrire c’est toujours être en quête du chef-d’œuvre parfait. A chaque roman on croit avoir atteint un sommet et en écrivant le suivant on découvre que l’on pouvait mieux faire. Le jour où quelqu’un l’écrira, le chef-d’œuvre parfait, il n’y aura plus rien à écrire, il n’y aura plus d’écrivains…
10 points qu’on connait déjà mais la piqure de rappel est souvent nécessaire (comment ça : mon livre n’est pas un chef d’œuvre ?).
Vos propos sont agréables à lire et je suis ravie d’avoir découvert ce site.
Bonne continuation !
Merci de me faire redescendre sur terre! Mais oui! Parce que quand on écrit pour la première fois on n’a pas de recul,
Merci pour votre message. J’espère que cette descente sur terre n’est pas synonyme de perte de motivation ! Mon but est d’aider les auteurs à rester rationnels, mais en rien de les décourager.
Merci de me répondre. Non! ma motivation ne s’est pas étiolée pour autant, elle reste intacte, seulement je voulais revenir sur le fait qu’on porte aux nues ce premier livre et on le considère comme un chef-d’œuvre!
Dans certains cas, c’est peut-être vrai ! 🙂 Mais il est rare qu’un artiste débute sa carrière par sa meilleure oeuvre… et c’est tant mieux ! 😉
J’ai le plaisir de dire que mon premier essai est un coup de maître puisque je vais être édité!
Toutes mes félicitations ! Comme quoi il n’y avait même pas besoin de redescendre sur terre ! 😉
ooh! Je suis sur même sur mon petit nuage! Mon livre sort aujourd’hui!
Bonjour
Je viens d’imprimer un petit opuscule à tirage très limité de quelques-uns de mes textes. C’est de l’auto-édition, donc. Mais puis-je encore les proposer dans un manuscrit à des éditeurs ? Ces textes-là sont-ils encore considérés comme inédits ?
Bonjour Colette,
Tout dépend de l’éditeur que vous contactez et de la nature de votre tirage. Si le tirage est confidentiel, mieux vaut ne pas en parler.
En revanche, veillez à ce que votre livre ne soit pas en vente sur aucune plateforme (Amazon, etc.).
Bien à vous,
Pierrick
Merci beaucoup pour votre réponse, Pierrick.
Non non, il ne sera jamais en vente sur Amazon mais un éditeur qui va publier mon recueil de poésie (pas du tout les chroniques), cet éditeur de poésie donc, à qui j’avais offert mon modeste opuscule, en fait du coup la publicité sur son site de maison d’édition. Me sens un peu dépassée 🙂
À partir du moment où votre livre n’est en vente nulle part, on peut considérer qu’il est inédit ! 😉 Que cela ne vous empêche pas de démarcher les éditeurs. Un éditeur intéressé n’aura aucun mal à passer outre ce petit détail.
Même si je le vends à des lecteurs qui me suivent sur mon site ? J’ai pas mal de commandes et je dois aussi le vendre bientôt sur un stand à une journée bio dans un village avoisinant (ce sont des chroniques paysannes)
Dans ce cas, c’est plus délicat.
L’essentiel est de déterminer si vous préférez auto-éditer ce livre (ce qui semble déjà être le cas) ou le faire éditer. Malheureusement, il y a des chances qu’un éditeur soit réticent à signer un livre s’il apprend que ce dernier est déjà commercialisé. Mais si vous avez déjà des commandes, vous n’avez peut être pas forcément besoin d’un éditeur.
Malgré tout, il est toujours possible de négocier avec un éditeur et de vous arranger s’il s’avère qu’un maison d’édition est intéressée par le texte.
J’en ai tiré cent exemplaires et il n’y a là que cinq chroniques.
Le manuscrit que j’aimerais proposer aux éditeurs en contiendrait une trentaine (dont celles-ci).
Dans ce cas, le texte peut être considéré comme original. Le mieux est de ne pas mentionner cette publication aux éditeurs en envoyant votre manuscrit, quitte à le préciser si une maison d’édition vous contacte.
Merci beaucoup Pierrick.
Bonne soirée !
ah ça! les éditeurs à compte d’auteur sont des escrocs, on ne le dira jamais assez. Ils se fichent de vendre votre livre, c’est votre argent qui les intéresse. J’avais 15 ans quand j’en ai fait les frais. Jeune et naïve, je ne me suis pas posée de questions. L' »éditeur » en question n’a même pas daigné m’informait qu’il avait fait faillite, je l’ai découvert par hasard (et j’ai du même coup compris pourquoi il ne m’avait pas donné les 30 euros qu’ils me devaient). On ne mettra jamais assez les gens en garde contre ça. Quitte à payer pour être édité sur format papier, autant le faire en auto-édition. Ca coûte moins cher pour un résultat semblable, et vous n’aurez pas l’horrible impression de vous être fait arnaqué au passage.
sinon, bon top 10. rien de très original, mais c’est toujours bon à de le rappeler.
Vous résumez bien ma pensée ! Désolé que vous ayez fait l’expérience de la chose, surtout si jeune (!). Comme quoi certaines personnes ne reculent devant rien.
Il y a une dimension que vous n’abordez pas, c’est le plaisir d’être édité, et de voir son propre livre chez soi, de pouvoir en donner à sa famille et à ses amis (parents, enfants, petits enfants) ; de voir que vos collègues achètent votre livre à la Fnac, chez Amazon, Chapitre.com et bien d’autres librairies en ligne. Après tout, il est bien aussi intelligent de s’offrir la publication d’un livre plutôt que d’acheter une montre Rolex qui ne donne pas mieux l’heure qu’une autre, un i-phone 7~ 8, ou autres babioles qui nous rendent esclaves de la société de consommation…
Quant au terme d’escrocs, je ne le partage pas car les termes des contrats sont clairs, et les éditeurs « participatifs » ne cachent pas que l’auteur participe, justement, aux frais de l’édition.
C’est ce que j’ai fait et je ne le regrette pas : j’ai rencontré plusieurs fois l’attachée commerciale de mon éditeur, été souvent en relation avec le service communication et le déroulement des opérations du dépôt du manuscrit jusqu’à l’édition proprement dite a été conforme à ce qu’on m’avait annoncé.
Je n’ai de toute façon pas l’intention de faire fortune avec mon livre, mais qui ne tente rien n’a rien !
Amicalement
Bonjour Jean-Luc, et merci pour votre commentaire. Vous avez tout à fait raison de préciser que se faire éditer à compte d’auteur peut avoir ses avantages, et je trouve par ailleurs votre commentaire très intéressant et sensé. Effectivement, il peut ou doit y avoir des éditeurs à compte d’auteurs compétents, et j’exagère probablement de les mettre tous dans le même panier.
Néanmoins, les auteurs qui me parlent de tels éditeurs sont rarement conscients qu’ils se tournent vers un éditeur à compte d’auteur, et généralement surpris qu’on leur demande de l’argent. Si l’éditeur à compte d’auteur n’est pas clair d’entrée de jeu, c’est déjà un mauvais « premier pas ».
Ah ces légendes dont on amuse le peuple… Emile Zola