L’utilisation de l’ebook dans la narration transmédia (3/3)

Les jours passent, et je n’ai toujours pas fini de vous parler de la narration transmédia. Rassurez-vous, l’article d’aujourd’hui sera le dernier consacré au sujet. Après avoir donné une définition de la narration transmédia et exploré le thème du livre numérique dans la narration transmédia, je me devais de terminer le sujet en évoquant des exemples de narration transmédia orientés autour du livre numérique. Cette partie, en plus de servir d’illustration, se veut également donner des idées de développements possibles autour du concept de transmedia storytelling.

Pottermore

Pottermore : un exemple d’utilisation du livre numérique dans le transmédia

Mes lecteurs qui ont le nez fin l’auront peut être senti venir, je pouvais difficilement passer à côté de Pottermore pour illustrer mes propos. Pour ceux qui ne connaitraient pas ce projet, il s’agit tout simplement d’une plateforme dédiée à la version numérique des livres de la saga Harry Potter. Quand elle avait déclaré le lancement de Pottermore en 2011, JK Rowling avait fait grand bruit. Il faut dire qu’elle promettait non seulement de nouveaux contenus autour de sa célèbre saga, mais qu’elle le faisait aussi et surtout en son nom propre, et non pas en celui de son éditeur. Dès lors, nombreux furent les fans à saliver devant l’annonce de cette plateforme unique qui allait leur permettre de replonger dans l’univers du magicien.

Parmi les promesses offertes par Pottermore, celles de découvrir du nouveau contenu écrit par l’auteur autour de l’univers, ainsi que des mini-jeux interactifs et la possibilité de parcourir des lieux clefs de la saga. A la clef, une immersion totale et une expérience interactive et communautaire. Chaque membre de la plateforme pourrait en effet devenir un « véritable » sorcier, interagir avec la communauté, donner ses avis sur les livres, voire proposer ses propres récits…

En tant que saga bestseller mondial, qui plus est doublée d’une adaptation cinématographique tout aussi appréciée, l’univers de Harry Potter était effectivement idéal pour lancer un concept de narration transmédia. L’implication directe de l’auteur des livres dans le projet était certainement ce qui motivait le plus les lecteurs. Et pour cause, JK Rowling avait déjà annoncé qu’elle ne reviendrait plus sur les aventures de Harry Potter, si bien que cette nouvelle plateforme devenait le seul moyen de replonger dans l’univers du sorcier et d’y découvrir de nouveaux contenus créés par l’auteur, et non pas par un producteur ou par un réalisateur.

JK Rowling PottermoreL’implication directe de JK Rowling dans le projet était un argument de poids pour les fans de la saga

D’un point de vue purement marketing, le choix de lancer un projet de narration transmédia autour des livres numériques Harry Potter était une idée de génie. En 2011, date de lancement de Pottermore, la saga cinématographique prenait fin, et le dernier livre Harry Potter était déjà sorti depuis 4 ans. Autant dire que les fans possédaient tous les exemplaires papier de la saga, et étaient finalement peu à trouver un intérêt à se procurer les versions numériques. La promesse d’une expérience inédite et de nouveaux contenus textuels et multimédia changeait la donne. Et autant dire que les fans étaient nombreux à se ruer sur Pottermore, quand bien même ils connaissaient déjà les livres sur le bout des doigts…

Au final, Pottermore a fait bien plus de bruit avant sa sortie qu’après. Pour cause, les promesses de JK Rowling quant à cette expérience inédite n’ont pas forcément été tenues. La plateforme, lancée avec Sony, s’est davantage avérée être l’outil marketing idéal pour vendre des ebooks et des liseuses Sony plus qu’une véritable expérience dédiée aux fans. N’étant moi-même pas particulièrement fan de la saga et n’ayant pas testé Pottermore, je me fais un plaisir de vous diriger vers l’article Pottermore, bilan d’une déception, qui résume assez bien l’effet « soufflé retombé » de cette expérience transmédia.

La narration transmédia : une affaire de moyens ?

Nous l’avons vu jusqu’ici avec des exemples tels que Pottermore, Star Wars ou Dofus, le transmédia stroytelling exige un minimum de moyens financiers, techniques et matériels. Que ce soit la création de gammes de produits dérivés (livres, jeux vidéo, etc.), le développement de plateformes web ou encore la gestion de communauté, le transmedia storytelling exige un investissement certain. Même l’une des auteurs les plus célèbres du monde, JK Rowling, a dû s’allier à une multinationale pour lancer son propre projet.

Coût transmédia storytelling

Certes, cet investissement est rarement vain, car la narration transmédia va souvent s’appuyer sur des communautés prêtes à débourser leur argent pour approfondir leur univers favori et recevoir de nouveaux contenus. C’était par exemple le cas des joueurs de Dofus ou des lecteurs de Harry Potter. Néanmoins, cela veut-il dire que la narration transmédia est réservée aux univers de fiction déjà cultes et « bankables » ? Rien n’est moins sûr !

Yumington Transmedia Storyverse : la narration transmédia à la française

Vous l’aurez compris, mon paragraphe précédent est une habile transition pour avancer un nouvel exemple d’utilisation de narration transmédia dans le livre numérique. Et cette fois-ci, nul besoin de quitter notre beau pays pour le trouver, ni même de chercher un investissement qui s’évalue en millions d’euros ! Nous allons parler ici de Yumington Transmedia Storyverse, un nom barbare attribué à un univers de fiction créé par l’écrivain français Jeff Balek.

Yumington StoryverseAvouons-le, cet exemple n’est pas innocent puisqu’il me permet de dépasser le simple sujet de l’édition numérique pour investir celui de l’auto-édition. Car, je vous le donne en mille : Jeff Balek est un auteur indépendant… Ou tout du moins un auteur investi, car il est vrai qu’il s’associe régulièrement avec des éditeurs pour diffuser ses textes. A vrai dire, mes lecteurs réguliers doivent très bien le connaître puisque j’ai déjà publié un article dédié à l’univers Yumington. C’est donc l’occasion pour moi de me répéter, cette fois-ci après avoir clairement posé le contexte et l’intérêt du transmedia storytelling.

A travers son Yumington Storyverse, Jeff Balek exploite un univers de fiction qu’il a créé, représenté en grande partie par la ville fictive de Yumington. Exploitée pour la première fois dans son roman Le Waldganger, Yumington réapparaît systématiquement dans chacun de ses textes, mais à différentes époques. Yumington a ainsi été le théâtre d’un roman steampunk, de textes d’anticipation mais aussi, plus récemment, d’un roman de science-fiction : Le rêve Oméga, publié chez Bragelonne.

Rêve OmégaPublicité fictive créée dans le cadre du projet Le Rêve Oméga

Là où l’univers de Yumington devient un projet de narration transmédia, c’est quand Jeff Balek implique directement ses lecteurs, et dépasse le simple cadre du livre numérique. En effet, l’auteur s’attache à impliquer ses lecteurs dans le projet, notamment en leur proposant de créer des Twitt’fictions (récits conçus sur le réseau social Twitter) autour de l’univers. Il veille également à dépasser le simple texte, notamment en proposant des bandes originales, des web-séries, des images ou des vidéos autour de ses textes.

L’enjeu de Jeff Balek, à travers ses créations, est bien entendu de fonder un univers crédible et complexe autour de ses fictions. Il parvient ainsi à fédérer une communauté autour de ses textes et à créer un phénomène d’attente à chaque nouveau projet. Cet exemple de narration transmédia est particulièrement intéressant, puisqu’il n’est pas créé avec les moyens financiers d’une grande société, et prouve qu’il peut y avoir des stratégies innovantes autour du livre numérique, même de la part d’acteurs indépendants.

Narration transmédia : conclusion

Cette série d’articles sur la narration transmédia est désormais terminée. J’espère qu’elle aura pu mieux vous faire comprendre ce concept, voire qu’elle aura pu faire germer en vous quelques idées… Il est intéressant de noter que le transmedia stroytelling reste un outil marketing très dans l’air du temps, puisqu’il joue avec la facilité actuelle de passer d’un média à l’autre et peut également impliquer la notion de communautés, chère aux twittos, facebookers et autre instagrammers de tous bords.

Si la diversité des médias utilisés implique souvent son lot d’investissements financiers et de compétences diverses, je pense que l’exemple de Yumington doit montrer qu’il est toujours possible de réfléchir à une narration transmédia, même lorsque les moyens sont limités. L’essentiel reste avant tout de disposer de l’univers de fiction adéquat, qui puisse charmer une communauté et la pousser à s’impliquer à 100% dans un projet…

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4 réflexions sur “L’utilisation de l’ebook dans la narration transmédia (3/3)

  1. Bonjour,
    Je travaille pour un ami auteur Julien Druinaud, qui a écrit le roman « Je ne ferai pas mieux que mon père » et je m’aperçois que nous sommes justement en train de réaliser un projet de narration transmédia ! Merci, je peux enfin mettre un nom sur ce projet 😉

    Alors pour ceux qui s’intéressent à ce projet, voilà le concept : le roman raconte l’histoire d’un jeune trentenaire parisien, un anti-héros moderne, qui se retrouve un soir de fin du monde, à errer de soirées en soirées catastrophiques. L’auteur distille la vie parisienne avec humour… Et la petite touche originale, ce sont les portraits des personnages façon wikipédia, un détournement humoristique du fameux site : ces portraits, comme dans wikipédia, contiennent de vrais liens qui mènent vers d’autres définitions, dans le blog du personnage. Et le personnage du coup continue d’exister sur la toile. Au delà de son blog, il a un compte twitter et Facebook et publie régulièrement la suite de ses aventures…
    Voilà le blog !
    http://gonzaguelanglois.com/

    Voilà je crois qu’on peut parler de narration transmédia, non ?

    • Effectivement, cela peut s’apparenter à du Transmédia. Dans un tout autre registre, l’idée de votre ami auteur me fait penser à la série How I Met Your Mother. Lorsque les personnages de la série parlent d’un site web, les réalisateurs prennent le soin de le créer « IRL », si bien que l’existence des personnages semble se concrétiser hors de la série. C’est ce qui se passe également, si j’ai bien compris, avec le fameux personnage, dont le blog existe réellement.

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